UNE HISTOIRE DE CLAQUETTES
Vous êtes bien installé, et bien tant mieux. Sinon, prenez vos aises. Rassurez-vous, ce n’est pas douloureux et ce n’est pas long.....
Remontons le temps et projetons-nous à la fin du XVIIIème siècle.
En Afrique, l’esclavage y est toujours intense (et ça dure depuis plus de 200 ans). Malgré cette menace, dans leurs villages, aux sons des tamtams, les Africains dansent pieds nus en déhanchant leur corps de la tête aux pieds. Ils communiquent grâce aux sons des percussions.
Leurs proches partent enchainés, déracinés, emmenant avec eux, leur culture, leurs chants, leurs danses et leur désespoir, vers l’Amérique.
Pendant ce temps, au nord de l’Europe, les Irlandais en bavent, vivant eux aussi une période tragique. La Grande Famine, causée par le mildiou qui détruit les récoltes de pommes de terre, décime la population irlandaise. Plus d’un million meurent de faim, d’autres encore plus nombreux, des épidémies. Plus de deux millions de la population émigrent vers les Etats-Unis. Ils communiquent grâce à leurs sabots de bois en les frappant sur des troncs d’arbres. C’est avec ces mêmes sabots qu’ils dansent « la gigue » (clog dance)
Ils emmènent avec eux leur culture, leurs chants, leurs danses et leurs espoirs.
Au XIXème siècle, les deux cultures se croisent dans ce nouveau pays qui sera bouleversé, un peu plus tard, par la guerre de sécession.
Deux danses se mélangent : La Gigue, danse irlandaise très rapide pratiquée en sabots et le Shuffle des esclaves (Shuffle un mot connu des claquettistes, non ?). Contrairement à la Gigue (danse ancienne) le Shuffle a été créé afin de pouvoir communiquer. En effet, les maîtres avaient interdit aux esclaves les tambours. Ils reproduisaient donc leurs rythmes ancestraux en trainant les pieds.
Des réunions dansées sont également organisées, sous le contrôle des municipalités qui autorisent seulement ces rassemblements en un lieu et moment : « Congo Square » jusqu’au coucher du soleil et non toute la nuit. Endroit mythique de l’âme noire.
En 1830, dans le quartier de Five Points, à New York, les deux danses fusionnent lors de compétitions, donnant naissance au « Buck and wing ».
1840 C’est le début des « Minstrel shows » théâtre forain ambulant composé d’artistes blancs qui se noircissent le visage au charbon et imitent chants et danses des esclaves en les ridiculisant.
1848 : William Henry Lane, dit Master Juba, premier noir à se produire sur scène, réussit admirablement à mélanger les deux styles de danses.
1850 les danseurs commencent à troquer leurs sabots pour des chaussures de ville en cuir, pour donner naissance au « Softshoe ».
On installe par la suite deux parties en bois sous les semelles (split clogs). Bill Robinson « Bojangles » utilise 36 paires de chaussures par an, les semelles en bois s’usant vite. Il commence par danser dans la rue puis dans les célèbres vaudevilles. Il tourne dans de nombreux films.
Il invente des pas imitant la gestuelle de la vie courante (Going to church) et d’autres les jeux des travailleurs du Mississippi (Falling off the log).
En 1865, c’est la fin de la guerre de sécession et l’abolition de l’esclavage.
Début 1900, à Broadway, les spectacles de music-hall font la notoriété de la ville, et les danseurs de claquettes se produisent sur scène en faisant évoluer cette discipline afin d’être « le meilleur ». Une véritable compétition apparait.
En 1918 la première école de claquettes voit le jour à New York.
En 1920, au début de la prohibition, les parties en bois disparaissent pour être remplacées par des fers. Voilà nos chaussures actuelles.
Pendant ce temps au sud, en Louisiane à la Nouvelle-Orléans, les deux cultures (Européenne et africaine) se mélangent également et donnent naissance au JAZZ.
Les claquettes trouvent dans le jazz une musique s’adaptant naturellement aux pas et le jazz trouve dans les claquettes un nouvel instrument de percussion. L’osmose est parfaite.
Ça sera le début d’une grande communion. Elle nous dévoilera d’énormes talents comme : ………..
Mais ça, c’est une autre histoire.
Date de dernière mise à jour : jeudi 13 octobre 2016